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15 juillet 1974: le jour où Chypre était coupée en deux

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Le 15 juillet 1974, les ultranationalistes chypriotes grecs lancent, avec l’aide de la dictature des colonels en Grèce, un coup d’état à Chypre contre le président Mgr. Makarios en place, pour demander le rattachement de l’île à la Grèce. Le 20 juillet, l’armée turque envahit Chypre sous le nom de code « Opération Attila », afin de protéger la communauté turque de l’île.

Depuis 1974, la partie grecque de l'île est séparée de la partie turque par une zone tampon démilitarisée
Depuis 1974, la partie grecque de l’île est séparée de la partie turque par une zone tampon démilitarisée

Colonie britannique depuis 1878, Chypre obtient son indépendance en 1960, après déjà cinq années de troubles ethniques entre les communautés grecque et turque de l’île, les nationalistes du mouvement grec Eoka (« l’Organisation Nationale des Combattants Chypriotes ») s’opposant aux Turcs de TMT (« l’Organisation de la Défense turque »). L’indépendance octroie aux Turcs une place privilégiée au gouvernement de l’île (30% des sièges au parlement alors que les Turcs ne représentent que 18% de la population de l’île), attisant de facto les tensions avec les nationalistes grecs. Ces derniers voient d’un mauvais œil l’indépendance de Chypre et militent pour l’enosis, le rattachement à la Grèce. Après 15 années de troubles aussi bien politiques (les Turcs se retirent du gouvernement chypriote en 1964) que sociaux, les ultranationalistes grecs d’Eoka B lancent le 15 juillet 1974, sous l’impulsion de la junte grecque au pouvoir à Athènes, un coup d’état contre le gouvernement chypriote de Makarios et tentent de mettre en place à Chypre un système similaire à celui de la dictature des colonels.

Mais l’armée turque réagit immédiatement, et envahit le Nord de l’île le 20 juillet, afin de protéger les membres de sa communauté. Rapidement, la Turquie prend le contrôle du tiers Nord de l’île, et une ligne de démarcation est tracée au Niveau de Nicosie. Elle doit son nom au fait qu’elle aurait été tracée au crayon vert par les Anglais, alors responsables de la mission d’interposition de l’ONU. Les Turcs la nommeront quant à eux « ligne Attila », en référence au nom de code de l’opération menée par l’armée turque le 20 juillet 1974. Dès lors, l’île est définitivement séparée en deux ensembles ethniquement homogènes. En 1983, la Turquie proclame unilatéralement l’indépendance de la République turque de Chypre du Nord* et lance une vague de colonisation des territoires au nord de la ligne verte, éloignant une fois de plus la perspective de processus de rapprochements.

Quarante deux ans après cet épisode, Chypre reste une énigme insoluble :

Par son histoire, nourrie de colonisations et de mélanges culturels permanents, Chypre n’a jamais été unifiée, socialement ou politiquement. La politique colonialiste britannique du Divide and Rule (diviser pour mieux contrôler) aura largement contribué à attiser l’animosité des populations grecque et turque tout au long de la période coloniale. Et même si le passage d’un côté à l’autre de la ligne verte chypriote est depuis 2003 une simple formalité administrative pour les habitants, la division de l’île entre la Turquie et la Grèce demeure source de tensions latentes. Bien que l’ensemble de l’île ait intégré l’Union Européenne en 2004, la partie nord de l’île reste sous contrôle militaire turc et ne bénéficie pas dans un premier temps des acquis communautaires. Progressivement, et dans un souci d’homogénéisation, l’UE accorde à la partie nord les aides qui lui permettent de s’affranchir légèrement de la tutelle turque, tout au moins sur le plan économique. Mais sur le plan politique, Chypre est pour Ankara le moyen privilégié d’expression de sa politique de leadership régional.

Quarante-deux ans après sa création, la ligne verte chypriote reste donc d’une inquiétante actualité. Un temps, avec la perspective d’entrée de la Turquie dans l’UE, des plans de rapprochement pouvaient être espérés. Mais depuis les récentes tensions entre Bruxelles et Ankara sur le plan diplomatique, le statu quo politique chypriote s’éternise, au détriment bien entendu d’une population plus divisée que jamais.

 

*Seule la Turquie reconnaît à ce jour la légitimité de cet état.

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